Monsieur Sweetlove,

Suite à la réception et à l'examination de votre manuscrit répertorié n° #135-B3 : L'Histoire de Poudlard à travers ses tableaux, nous sommes dans le plaisir de vous informer de l'enthousiasme qu'a susciter votre ouvrage au sein de l'équipe éditoriale. Afin de décider d'un comme un accord d'une future collaboration possible, nous souhaiterions vous rencontrer dans les prochaines semaines à venir. Nous vous serions donc priés de bien vouloir nous faire part de vos disponibilités par retour de hibou. Merci.

En attente de votre réponse, veuillez croire monsieur en l'expression de nos sentiments distingués,

Anthiocus B. Harker, Directeur éditorial d'Obscurus Books

Voilà la lettre que j'avais reçu quelques jours plutôt au cottage. Un mois auparavant, j'avais envoyé aux éditions Obscurus Books du Chemin de Traverse, le manuscrit du livre que j'avais mis cinq ans à rédiger. En temps qu'historien, publier un livre sur l'Histoire de la Magie était un aboutissement professionnel important pour moi. Recevoir cette réponse positive des éditions Obscurus Books était une grande surprise et j'avouais encore avoir du mal à réaliser qu'un ouvrage portant mon nom allait peut-être voir le jour. Mais même si j'étais heureux de cette nouvelle, il y avait une chose qui me retenait encore : le Chemin de Traverse. Pour espérer voir un jour mon livre être publié, je devais me rendre à un entretien au Chemin de Traverse et l'idée d'y retourner depuis que j'y avais été attaqué me donnait des sueurs froides. Mais ce matin, je n'étais décidé. J'avais repoussé l'échéance trop de fois et aujourd'hui était la date butoir du dernier rendez-vous qu'ils m'accordaient. Tapit dans le cottage, face au miroir de la salle de bain, je regardais mon reflet dans le miroir en me dévisageant. Mon coeur battait la chamade à l'intérieur de ma poitrine et je m'efforçais de gonfler mes poumons pour l'oxygéner. Je fermais les yeux et essayais de me calmer. Il n'y avait pas de raisons d'avoir peur, je devais juste faire attention et avoir un comportement normal. Tout allait bien se passer, tout allait bien se passer... « Amore, tu vas être en retard ! » me sortit à coup la voix de Sofia de mes pensées. Je rouvrais les yeux et j'ouvrais le robinet pour me passer un peu d'eau sur le visage. J'attrapais une serviette et épongeais mon visage. C'était ridicule d'avoir peur, il fallait que je prenne sur moi. Je finissais de m'habiller et je sortais de la salle de bain en costume. « Tu es très beau chérie » me dit Sofia en serrant mon noeud de cravate. J'esquissais un sourire maladroit. « Tu es sûr que tu veux y aller ? » dit soudain Sofia d'une voix brisée. Son visage s'était fermé et ses joues avaient perdu de leur couleur. Je posais une main sur son visage. « Je reviens le plus vite possible » lui dis-je à voix basse avant de l'embrasser. Je lui souriais pour la rassurer et attrapais ma serviette. J'offrais un dernier baiser à Sofia, puis empoignais ma baguette pour transplaner.

Ellipse

Je ressortais du vieux bâtiment avec un sourire aux lèvres. Au dessus de moi, l'enseigne de Obscurus Books se balançait à la force du vent. C'était une belle journée qui commençait. Dans ma serviette, un double d'un contrat signé pour la publication de mon livre. J'en avais retrouvé le sourire, un sourire de gamin. Je prenais une bouffée d'air et me dirigeais vers la sortie nord du Chemin de Traverse. Tiens, je me disais même que j'allais me prendre un rhum groseille au Chaudron Baveur pour fêter ça. Je marchais d'un pas assuré et passais devant l'Allée des Embrumes, quand je reconnus parmi les sorciers vêtus de noirs un visage que je connaissais bien : Shanaëlle. Elle était bloquée contre un mur entourée de deux sorciers qui devaient faire au moins deux têtes de plus qu'elle. Une baguette sous la gorge et une baguette sur sa poitrine, elle ne pouvait plus bouger. « C'est trop tard maintenant Malfoy » siffla l'un des hommes entre ses dents. Bien entendu aucun sorcier dans l'Allée des Embrumes ne bougeait un sourcil, ce spectacle était bien trop habituel pour ce coin du Chemin de Traverse. Alors que l'un des sorciers levait sa baguette sur le visage de Shanaëlle pour lancer un sort. Je plongeais ma main dans mon manteau et dégainais avant lui. « Stupéfix ! » scandais-je en pointant ma baguette sur le premier sorcier. Un jet de lumière rouge sortit de ma baguette et alla frapper de plein fouet le sinistre homme. Celui-ci s'écroula sur le sol après avoir fait un vol plané. Alors que l'autre se retournait la baguette en position d'attaque, je le prenais de court. « Expelliarmus » dis-je à voix haute. Sa baguette lui échappa des mains et celui-ci s'enfuit en me jetant un regard noir. Les agresseurs hors d'état de nuire, je me dirigeais vers Shana. « Tu vas bien ? » demandais-je d'un ton inquiet. Shana et moi, c'était une longue histoire, pas toujours très blanche. Mais cela aurait été d'une lâcheté insensée si j'avais passé mon chemin en sachant ce qui allait lui arriver. Je n'étais pas un homme cruel, même si j'avais encore une dent contre elle.

Shanaelle tu dois prendre position et publiquement. Allons père ! Tu n'as plus le choix ! Tu vas au ministère maintenant et tu prêtes allégeance au Seigneur des Ténèbres m'as-tu bien compris ?! Je me levais pour regarder mon père mais je lui jetais un regard rempli de haine. Il ne pouvait pas savoir combien je pouvais le haïr à ce moment là. Je mis cependant mon manteau et j'entrepris de me rendre au Ministère. Je ne voulais pas prêter allégeance au Seigneur des Ténèbres. Je m'en fiche du sang, je ne crois plus en cela. Depuis que j'avais perdu mon enfant j'avais changé totalement ma vision des choses. Je restais cependant une réelle serpentarde mais je ne faisais pas partie des extrémiste comme mon père en faisait parti. Mais je n'avais plus le choix. Il fallait que j'aille au ministère et que je fasse ce que mon père me disait pour qu'il me fiche enfin la paix. Malgré toute la bonne volonté que j'avais je ne pus passer la porte du ministère. Je préférais me rendre au chemin de traverse pour prendre quelques denrées pour mes potions. Je vis des mangemorts. Je les regardais droit dans les yeux. Ils me connaissaient je les avais vu quelques heures plus tôt chez mon père. Ils étaient avec lui quand il m'avait sommé d'aller prêter allégeance à Voldemort et je n'y étais pas allée. J'entrais quand même dans l'allée des embrumes pour aller acheter ce dont j'avais besoin. Ils me suivirent mais je faisais comme si rien n'était. J'entrai dans le magasin pour prendre la commande que j'avais passé le matin même puis je ressortais. Tu as oublié de t'arrêter au ministère... Le seigneur des ténèbres t'attendait... le pauvre l'aurai-je vexé ? Ne joue pas Malfoy. Ou sinon ? Ils me plaquèrent contre le mur. Je savais que je n'étais pas dans une position des plus adéquates pour m'en sortir mais j'allais bien y arriver par une pirouette comme à chaque fois. Ils levèrent leur baguette. Je n'avais pas peur. J'avais l'habitude de voir cela. Mon père me faisait toujours « peur » en levant sa baguette sur moi quand j'étais gamine. Ce n'était pas deux petits mangemorts qui allaient vraiment me faire peur. Je peux vous suivre maintenant si vous le voulez... C'est trop tard maintenant Malfoy. Le premier sorcier me jeta un sort au niveau de mon bas ventre. Je sentais le liquide rouge s'écoulait de ma peau sans que je ne puisse l'arrêter de moi même. Si je faisais un seul geste je risquais ma peau. Ils ne me tueraient certainement pas mais par contre, ils risqueraient de me faire passer un sale quart d'heure. Stupéfix ! Expelliarmus ! Tu vas bien ? Tout s'enchaîna très vite. Je n'eus pas le temps de voir ce qu'il s'était passé mais je voyais Timothy Sweetlove devant moi. Avait-il gagné en courage et serait-il venu à mon secours ? Non Shanaelle ce n'était pas le moment d'être mesquine il venait quand même de te sortir d'un mauvais pas. Je pense que ça va aller ne t'inquiète pas je suis solide. Je lui souriais. C'était bien la première fois que je lui souriais sincèrement. Alors que je me relevais pour partir je sentis mon esprit s'embrumer et ma main se porta immédiatement à mon bas ventre. Je sentais du liquide se répandre dessus et je sentais que je tournais de l'oeil. Je m'accrochais à Timothy pour m'aider à me soutenir. Il pouvait aisément voir que ma main était pleine de sang.

« Tim est-ce que ça va ? » demanda la voix de ma mère alors qu'elle était en train d'équeuter des haricots au dessus de l'évier. J'étais revenu quelques jours plutôt chez mes parents pour passer les vacances de Pâques. Je n'avais pas revue les côtés de Roshilli depuis près de six mois. Je ne vivais plus qu'à Londres ces derniers temps à cause de mes études à l'Ecole Supérieure d'Enseignement Magique et aussi à cause d'une autre chose... Cela faisait un moment que je n'avais pas vu mes parents, ni même ma petite soeur. J'avais la tête ailleurs depuis un certain temps. Aidant ma mère pour la cuisine ce soir-là, je relevais les yeux vers elle après qu'elle m'ait parlé. « Oui, pourquoi tu me demandes ça ? » demandais-je à ma mère d'un air distrait en continuant mon activité. Depuis mon arrivée, je n'avais pas beaucoup parlé, je n'avais pas fait grand chose d'ailleurs. J'étais sortie, j'avais étudié et fais un peu de magie. Rien de très construction, ni de très familial. « Ton père et moi nous inquiétons beaucoup pour toi. Tu n'envoies presque plus de hiboux, tu rentres tout les six mois et... » dit-elle d'une voix éteinte et hésitante. Épluchant des pommes de terre, j'enfonçais profondément la lame du couteau dans le tubercule, sentant la leçon de moral arriver. Je n'avais aucune envie d'entendre ma mère me dire ce que je devais faire ou pas à 25 ans passés. Percevant ce qui allait venir, je regrettais soudain d'être revenu et pensais à la soirée que je perdais alors que j'aurais pu la passer en compagnie de Shanaëlle dans le Londres sorcier. Perte de temps, tout ça n'était qu'une perte de temps. « Je ne suis pas stupide Timothy. Je t'ai élevé, alors si il y a la moindre chose que tu voudrais me dire... » dit-elle d'un ton maternelle qui raisonnait autrement dans mes oreilles. Je poussais l'égouttoir à pommes de terre dans l'évier d'un geste brusque et plantais avec rage le couteau sur la planche à découper. Ma mère sursauta. « Ca va ! J'ai dit que ça allait ! Ca ne te suffit pas ! » hurlais-je à ma mère. Ma mère me regardait horrifiée comme si c'était la première fois que je levais la voix face à elle, ce qui était en partie vrai. Elle me regarda un long moment sans bouger avant que son expression de terreur ne se transforme en un visage froid et fermé. « Tu sors Timothy » lâcha-t-elle d'un ton ferme. Je fronçais les sourcils et le dévisageais ne comprenant pas ce qu'elle voulait dire. Ma mère lâcha ce qu'elle avait dans les mains et se tourna vers moi en me toisant. « Tu sors de cette maison Timothy et tu ne reviens que lorsque tu es redevenu mon fils. Maintenant va-t-en ! » m'ordonna-t-elle en me montrant la porte. Hors de moi, je ne me faisais pas prier et sortais de la maison familiale après avoir fait mes valises. « Timmy ? » demanda la voix frêle de ma petite soeur avant que je ne passe la porte. Je me retournais et posais mon regard sur ses yeux scintillants. On aurait dit qu'elle pleurait. Du haut de ces douze ans elle avait la présence d'une grande personne. Je m'approchais d'elle pour aller la prendre dans mes bras, mais contre toutes attentes elle recula comme apeurée. Je restais interdit face à ce geste. Aurora se cacha derrière un mur et je quittais la maison dans un état d'esprit partagé. Le soir, je rentrais à Londres en transplanant et passais la nuit dehors pour réfléchir. Le lendemain, je rejoignais Shanaëlle comme à mon habitude et après une soirée à constater ce que j'étais devenu, j'abandonnais la sorcière sans un mot. L'histoire était finie...terminée.

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J'avais changé. Depuis les années Shanaëlle j'avais changé et si j'avais pu le faire pourquoi pas elle aussi. Avec le temps j'avais perdu de ma lâcheté. C'est ce que j'étais avant un lâche. C'était un trait de ma personnalité que j'avais eu durant de nombreuses années et qui me faisait honte aujourd'hui à chaque fois que j'y repensais. Beatrice, Shanaëlle, ma famille, j'avais laissé tomber beaucoup de personne lorsque j'étais jeune, mais aujourd'hui c'était fini. Je faisais tout pour me rattraper. Même si Shanaëlle m'avait fait du mal, je lui en avais peut-être aussi fait. C'est donc en homme assuré que je repoussais les deux agresseurs de l'ex-serpentarde. Lorsque ceux-ci furent hors d'état de nuire. Je m'approchais de Shanaëlle pour lui demander si elle allait bien. « Je pense que ça va aller ne t'inquiète pas je suis solide » dit-elle en m'adressant un sourire. Un sourire ? J'aurais imaginé qu'elle m'aurait repoussé et m'aurait dit de m'occuper de mes affaires, mais c'était tout le contraire. Je m'étais peut-être trompé sur son compte. Shanaëlle s'appuya sur moi tandis qu'elle portait la main à son ventre. Je la regardais faire puis constatais que sa main était couverte de sang. Shanaëlle perdit l'équilibre et je passais un bras sous ses épaules pour la soutenir. Je la trainais jusqu'à un coin moins reculer du Chemin de Traverse et la déposais sur un banc qui trônait devant une vitrine. Du sang coulait sur son jean, sortant de sous son manteau et la vision de moi blessé quelques temps plutôt me revint immédiatement en mémoire. Le Chemin de Traverse était vraiment devenu un endroit à ne pas fréquenter. Et dire que des enfants y venaient régulièrement... Je posais une main sur le manteau de Shanaëlle puis me retenait. « Laisse-moi regarder s'il te plait » demandais-je en la regardant. Shanaëlle visiblement paniquée acquiesça d'un signe la tête. J'ouvrais son manteau et regardais sa blessure. Une tâche rouge recouvrait son bas ventre. Je voyais ma propre blessure à la place de la sienne. Je sortais ma baguette et la pointais sur sa blessure. Il était temps que je mette en pratique, la médicomagie que j'avais appris avec ma femme. « Vulnera Samento » chuchotais-je avec application. La blessure de Shanaëlle commença à se refermer et je répétais la formule plusieurs fois de suite pour que le maléfice continue à agir. Après de longues secondes, la blessure de Shanaëlle se referma enfin. Je posais une main sur son ventre où je remarquais soudain une autre cicatrice plus ancienne. Je fronçais les sourcils puis me relevais sans oser lui demander comment elle se l'était faite. Dans mes souvenirs, elle n'avait aucune marque à cet endroit là ... « Voilà » dis-je le plus simplement du monde en m'asseyant à côté d'elle sur le banc.

J'étais contente d'être tombée sur Timothy. Pourquoi me direz-vous ? Et bien parce qu'il n'est pas mon petit ami et qu'il n'irait pas risquer sa vie pour redorer mon honneur. Et aussi parce que je savais que même s'il m'en voulait d'avoir presque cassé son couple, il ne me laisserait pas toute seule dans une mauvaise passe. Vous avez bien vu il est venu à mon aide. Alors qu'il n'avait aucune véritable raison de le faire. Je crois que je l'en remercierai toute ma vie. Finalement Timothy était un homme respectable. Je sais c'est un grand pas mais je vous le dis à vous et sûrement pas à lui, ça le rendrait trop heureux que je lui doive quelques choses. Il me rattrapa par les épaules et me traina tant bien que mal jusqu'à un banc du côté de Gringotts. Au moins nous serions tranquille ici. Je grimaçais tandis que Timothy me déposait sur le banc. Je pense que j'étais vaccinée du chemin de Traverse pendant un moment ou autrement dit, je n'y retournerai qu'avec Phineus. Laisse-moi regarder s'il te plait. J'étais complètement paniquée. J'avais déjà vécu cela, je veux dire que j'avais déjà perdu pas mal de sang à cause d'une blessure à mon bas ventre et la dernière fois j'avais perdu mon enfant. Sauf que là je n'avais pas d'enfant et que je risquais ma vie... J’acquiesçais alors pour qu'il puisse me soigner. Je me doutais que c'était son italienne qui lui avait appris ce sort parce que du temps que nous étions ensemble il ne connaissait pas ce soit ou du moins je ne pensais pas qu'il le connaissait. Quand il prononça la formule je sentais un chaleur se propageant sur mon ventre. Je n'avais pas cette sensation. Elle me rappelait bien trop de mauvais souvenir. Je le laissais faire en regardant au loin. C'était une évidence. Il allait la voir. Je ne voulais pas qu'il la voit. Enfin, je n'avais pas le choix du tout. Il devait me soigner alors je le laissais faire. Au bout d'une minute ou deux, je me sentais beaucoup mieux. Affaibli mais beaucoup mieux. Voila. Il s'assit à côté de moi sur le banc. Je ne bougeais pas d'un poils. Je m'en voulais de m'être cru plus forte que ces mangemorts. Il allait falloir que je parle à mon père pour qu'il leur dise qu'il ne fallait pas qu'ils m'attaquent. Je finissais par me bouger un peu sur le banc et je me retournais vers lui. Je lui devais bien une explication ou du moins le remercier. Je te remercie Timothy. Vraiment merci. Je savais que mon comportement devait le surprendre mais je lui devais bien ça. Je prenais une profonde inspiration puis je dis très vite. La cicatrice que tu as vu... Je fermais les yeux. Je n'avais pas parler de cette histoire mais il fallait bien que je lui explique. Peut être qu'il comprendrait un peu mieux mon comportement très négatif depuis mon retour à Poudlard. J'ai perdu un enfant il y a même pas un an. Je regardais droit devant moi. S'il voulait des explications je les lui fournirais mais s'il ne demandait rien je ne dirai rien de plus. Finalement cette rencontre était vraiment étrange mais heureusement qu'elle a eu lieu.

Voyant la blessure de Shanaëlle se refermer petit à petit, j'espérais qu'elle s'en rappellerait pour plus tard. Vu comment elle m'avait stupéfixé et entaillé la joue dans la salle des professeurs, j'espérais qu'elle se rappellerait de mon geste quand je serais moi-même dans de sales draps un beau jour. J'avoue ne plus trop la connaître, même si je retrouve plusieurs traits de caractère de la jeune femme que j'ai connu dans le passé, j'ai du mal à la percevoir. Elle n'a pas l'air tellement plus heureuse depuis qu'elle a failli faire capoter mon mariage. Quelque chose d'autre devait lui tenir sur le coeur, quelque chose de plus profond qu'un coeur brisé de jeunesse. « Je te remercie Timothy. Vraiment merci » me dit-elle en se redressant sur le banc. Je tournais la tête vers elle, assez surprit et l'observais quelques instants. Shanaëlle Malfoy disait rarement merci. Dans sa famille, aussi pure et respectable soit-elle, les marques de politesse étaient pareil à de l'eau en plein désert. Enfin, la vue de son sang l'avait peut-être trop bouleversé pour oublier les traditions familiales. Je ne savais pas si elle avait lâché ses mots dans un moment de faiblesse, mais je lui en étais reconnaissant. « Je t'en pris » lui répondis-je en lui adressant un léger sourire sincère. Je délaissais les yeux bleutés de la jeune femme pour regarder instinctivement son ventre, parcelle de son corps où elle était encore blessée quelques secondes auparavant. « La cicatrice que tu as vu... » dit-elle tout à coup dans une respiration. Je relevais la tête vers elle pour la regarder avec attention. La cicatrice que j'avais sur le bas de son ventre, près de sa blessure, oui que voulait-elle dire ? Je l'avais remarqué, mais je ne lui avais posé aucune question dessus. Chacun à ses secrets et ses cicatrices, le monde entier n'est pas obligé d'en connaître l'existence. Je la vis fermer les yeux comme si elle souffrait intérieurement. Voyant qu'elle ne touchait pas son ventre, sa réaction n'était pas du à un effet secondaire de mon sort. C'était cela de gagner, mais elle n'avait pas l'air à l'aise pour autant. « J'ai perdu un enfant il y a même pas un an » finit-elle par dire comme si elle venait de se soulager d'un énorme poids. Le monde extérieur se troubla et mes oreilles se mirent à siffler comme si j'avais reçu une gifle en pleine figure. Un enfant ? Je restais un long moment interdit. Si je m'étais attendu à cela ? Si...j'avais su déceler cela ? Elle avait perdu un enfant. C'était donc cela. Cela la haine dans ses yeux. Le regard de dégout qu'elle avait à mon égard quand j'étais près de Sofia ou que je parlais de mon fils. C'était cela qu'il lui manquait. Je repensais à l'heure à nos retrouvailles, à ce qu'elle avait fait. Je comprenais pourquoi elle avait agit ainsi. Savoir que je le l'avais laissé pour aller me construire une famille parfaite ailleurs, alors qu'elle avait perdu l'être le plus chère qu'une femme puisse avoir. Je m'étais trompé ce jour-là dans la salle des professeurs, elle avait bien changé. Elle était devenue une femme, certes meurtrie, mais une femme qui avait appris ce qu'est la vraie vie. Pour posséder un fils et bientôt un autre enfant, je pouvais assurer que je ne souhaitais à personne de perdre l'un d'entre eux, même pas à Shanaëlle. J'avais comme un sentiment de repentir qui montait en moi par rapport à elle, même si je ne pouvais totalement lui pardonner de m'avoir arrachée Sofia et mon fils durant deux interminables semaines. Je ne sais pas comment je réagirais si je perdais mon fils et mon futur autre enfant. Je crois que je serais encore plus anéanti que je l'ai jamais été. Les enfants ne devraient jamais partir avant leurs parents, encore moins les tout petits. Je baissais les yeux comme gêné par le regard de Shanaëlle. Mes yeux me faisaient mal tout à coup et je portais ma main à ma bouche comme cacher l'émotion que mes lèvres pourraient révéler. J'avais vécu quelques drames les années précédentes, mais celui-là je n'en avais pas l'expérience et espérais ne jamais l'avoir. « Je...Je suis désolé Shanaëlle » finis-je par dire le plus stupidement du monde. Qu'est-ce qu'on peut dire dans ces circonstances à part qu'on est désolé ? On ne pourra jamais ramener l'être aimé à la personne. On ne pourra jamais éprouver sa douleur, même si l'on se veut empathique. Rien, on ne peut rien faire à part être là à la place d'un autre. Mon regard se retourna une nouvel fois sur le ventre de Shanaëlle, elle avait du être magnifique enceinte. Stupide idée que j'avais tout à coup. Je repensais à la cicatrice qui ornait le bas de son ventre. Si elle était là, je pouvais en déduire qu'on avait du lui retirer l'enfant. Était-il mort dans son ventre ou n'avait-il pas survécu à la césarienne ? L'avait-elle vu en vie se serait-ce qu'une seconde ? Je fermais les yeux pour chasser cette pensée de mon esprit. Je décidais alors de la regarder en face. « C'est cela qui t'a poussé à venir à Poudlard ? » lui demandais-je d'un voix calme et amicale. Mon ton était éteint, en parfaite adéquation avec la tournure grave de la discussion. J'avais beau avoir de la rancune pour elle, je n'étais pas égoïste au point de pas être touché par ce qu'elle venait de m'avouer. C'était une marque de confiance, si ce n'était même de paix. Peut-être que nous aurions du avoir cette conversation plutôt entre adultes au lieu de nous tirer dans les pattes à Poudlard. Il était temps de déposer les armes. J'attendais sa réponse, puis reprenais avec précaution. « Et ton mari ? » demandais-je une nouvelle à demi-mots. Je n'attendais pas de réponse franche de sa part, ni même qu'elle me raconte tout dans les moindres détails. Elle était sauvage, secrète, imprévisible et maintenant meurtrie.