TO BEAST OR NOT TO BEAST

Sonny déposa 3 gallions sur la table, mit sa veste en jean puis sortit. Il sillonna le Chemin de Traverse, entra dans le monde muggle, parcourut deux avenues, quelques ruelles et il fit enfin face à un petit immeuble en briques rouges de trois étages. En voyant ce vieux et miteux bâtiment, il soupira. Après avoir vérifié à sa gauche puis à sa droite que personne ne faisait attention à lui, il poussa la porte de l’immeuble et monta les marches qui craquaient légèrement sous son poids. Elle était déjà là, les bras croisés, appuyée contre la porte de l’appartement où ils avaient rendez-vous, mais elle était différente. Différente dans le sens où elle ne souriait pas malicieusement comme d’habitude, impatiente de le tirer par le col dans l’appartement pour l’embrasser fougueusement, le déshabiller, déposer quelques baisers sur son corps, atteindre le sommet, s’endormir, se réveiller, fumer une clope et peut-être boire une bière avec lui, roter comme un troll sans qu’il ne fasse une grimace comme tous les autres. Son visage affichait au contraire un air grave, comme si elle allait lui annoncer une mauvaise nouvelle. Rectification, elle allait lui annoncer une mauvaise nouvelle.
Il s’avança vers elle, ils entrèrent dans l’appartement et ils pénétrèrent dans la cuisine. Ils s’assirent autour de la table centrale en plastique bleu pâle. Il y eut un silence. Elle se leva pour ouvrir le frigo et essayer de dénicher quelque chose à manger. Il n’y avait rien à part une bouteille de whisky qu’elle avait acheté l’autre jour. Elle prit deux verres dans un meuble haut, se rassit et se servit, posant l’autre verre en face du jeune homme. Ce dernier ne broncha pas, gardant ses yeux bleus fixés sur la jeune femme.
 

Tu t’es coupée les cheveux.
Oui.

Elle passa machinalement sa main dans ses cheveux roux-rose puis but une gorgée. La voix de Sonny semblait enrouée. Elle ne sonnait plus comme un cristal clair du jeune homme qu'elle avait connu et aimé mais comme celle d'un total inconnu. Elle soupira.
 

J’ai déjeuné avec Caro aujourd'hui.
Hum. Et ?

 
Ses yeux croisèrent ceux de Sonny, enfin. Elle avait à tout prix essayé de les éviter car elle voulait à tout prix ignorer sa réaction. Il la regardait sérieusement et attendait plus d’explications. Bien plus d’explications. Il semblait tout à fait impassible mais à l'intérieur, il bouillonnait. Il savait exactement ce qu'elle allait lui dire. Il savait exactement ce qu'elle allait lui sortir, comme toutes les autres, elle avait fini par s'interroger, se demander qui était réellement 'Spencer Nolan-Cricket', un faux nom qu'il renouvelait à chaque rencontre tout en gardant ses initiales. Elle avait fini par ne plus être la parfaite jeune muggle insouciante qui se plaît dans ses bras et voudrait bâtir un avenir avec lui. Cela lui convenait parfaitement, cela dit. Elles n'étaient que des passagères dans le train qu'était sa vie, que des jeunes filles naïves qui espéraient pouvoir se pavaner à vie à son bras alors qu'il leur mentait ouvertement, à elle et à tout leur entourage.
En réalité, il n'avait aimé aucune d'elle. Aucune. Il n'était pas quelqu'un sans cœur, loin de là, mais le fait de sortir avec quelqu'un, de l'embrasser, cela ne l'intéressait pas. Il faisait semblant, comme lorsqu'on est enfant et qu'on joue à la maman et au papa, à la guerre, aux pirates ou à la dînette. Que faire avec elles ? Toutes à vouloir des bijoux, des photos souvenirs, des cadeaux. Toutes chiantes. Et les mecs ? Ce n'était certainement pas pour tout de suite. Pour jamais probablement.
Ce n'était pas le fait qu'elle veuille le quitter qui le mettait en colère. D'ailleurs, il était plutôt heureux. Il pourrait enfin défouler toute la haine ramassée durant ces derniers mois contre quelqu'un. Les souvenirs désagréables filaient devant ses yeux, il voulait se rappeler de tous, sans en omettre aucun pour être encore plus soulagé après. Et il s'arrêterait au dernier moment, avant qu'elle n'expire, détruirait tout ce qu'il pouvait y avoir comme souvenirs de lui puis disparaîtrait dans le monde des sorciers, comme d'habitude. Les muggles étaient un très grand avantage sur ce point-là. Ils ne pouvaient pas le retrouver dans le monde des sorciers.

Elle déposa son verre puis baissa ses yeux à nouveau. Il se leva et se dirigea vers la fenêtre qui donnait sur la cour intérieure. Quelques minutes passèrent ainsi, dans un silence lourd et pesant. Soudain il se retourna et s’approcha d’elle. Elle crut qu’il allait l’embrasser une dernière fois et la laisser partir. Elle crut qu’il allait comprendre, lui dire que lui aussi avait pensé à la quitter, lui dire que lui non plus, il ne l’aimait plus.
L’arrête de son nez se brisa et son sang coagula au niveau de sa tempe gauche puis de sa joue droite. Son cœur fit un bond. Elle ne pouvait pas crier. Ses premiers pas en enfer avant même de mourir, qui l'aurait cru. Il ne l’avait jamais aimé. Elle n’avait été qu’un jouet. Qu'elle avait été conne. Bon dieu, qu'elle avait été conne.

BLOODY LIE

Sonny ressortit de l’immeuble, regardant à nouveau à gauche puis à droite. Toujours personne. Il remit correctement le col de sa veste avant de sortir de l’impasse.
C’était un début de soirée très doux, où le soleil était encore loin de se coucher. Beaucoup de gens circulaient dans les avenues et se fondre dans la foule pour disparaître était parfait. Il mit ses lunettes noires, s’engagea dans une ruelle déserte puis dans une autre pour déboucher sur un boulevard très fréquenté. Personne ne faisait attention à lui et c’était très bien ainsi. Elle avait déjà peut-être appelé les autorités et les secours si elle était en état – ce qui était loin d’être le cas. Puis elle n’avait pas assez de courage pour, elle avait trop peur qu’il revienne et saisisse ses jolies mèches flamboyantes pour coller son crâne contre le mur.

Ses lèvres s’étirèrent de satisfaction. Il était totalement prêt à encaisser tout ce qui allait lui déplaire dans les mois à venir, comme les mauvaises notes que Stefan lui collerait, les sautes d’humeur d’Asher, les réprimandes de ses parents, les probables engueulades avec ses ‘amis’… Ensuite, lorsqu’il saturerait, il aurait toujours une poupée malléable qu’il pousserait à lui poser des questions sur sa vie, des questions auxquelles il ne répondrait jamais. Elle déciderait alors de le quitter et il pourrait se défouler naturellement, prétextant un cœur brisé en milliards de petits morceaux et repartir à nouveau pour quelques mois. Joyeuse routine.
Mais n’était-ce pas trop dangereux de garder toujours les mêmes initiales ? La prochaine fois, il prendrait celles d’un de ses frères et ce, pour une dizaine de donzelles avant de prendre celles de son autre frère, celles de son père, de sa mère, d’autres sorciers de Hogwarts… Il alternerait aisément. Encore une merveilleuse idée, tu es un génie mon vieux Sonny.
S’envoler trop haut dans le ciel ? Loin de là. Sonny réfléchissait d’ailleurs même quel serait son futur pseudonyme… S’il prenait les initiales de Stefan, cela lui donnait SJC, soit Swan Johnny Cracker. Parfait. Et dire que Stefan, justement, le prenait pour un parfait imbécile en lui donnant des notes à chier. Si seulement il savait qui était le prodige de la famille, l’intellectuel, le meilleur ? Lui-même bien sûr. Mais c’était loin d’être remarqué, Sonny prenait soin de ne pas l’exposer. On voyait seulement de lui qu’il travaillait dur, qu’il était très agréable avec son entourage, qu’il était drôle, positif, serviable et très bien élevé, insouciant, charismatique, passionné, ouvert et qu’il allait même jusqu’à fréquenter quelques half-blood, tout en étant sûr qu’ils aient des antécédents impeccables jusqu’à ‘l’erreur’. A croire que lui-même était une erreur chez les Crabbe. Qui l’aurait cru ? Son père et sa mère, respectés de tous, son frère aîné professeur et même pas foutu de lui donner un seul O, son deuxième grand frère avec qui il passait autant de temps à se battre qu’à s’amadouer. Tous croyaient que Sonny était l’exception chez les Crabbe et une plutôt bonne exception à vrai dire.
Tous ces cons avaient faux. Non, d’un certain côté, ils avaient raison mais qu’ils étaient naïfs et aveugles ! S’ils voyaient qu’en réalité, Sonny était un marionnettiste accompli, qu’il était impatient, colérique, égoïste, qu’il transpirait la fierté de sa famille et de lui-même, arrogant et curieux. Pourquoi n’avait-il jamais touché à une seule fille de Hogwarts alors qu’elles se traînaient littéralement devant lui ? Pourquoi ne touchait-il jamais un seul de ses camarades et ne les laissait pas le toucher ? Aucun contact, que ce soit une main sur l’épaule pour l’arrêter ou une petite tapette amicale pour le chercher. En réalité, Sonny était autant inaccessible qu’abordable – hormis pour les mudblood qui ne devaient même pas espérer l’approcher dans un rayon inférieur à deux mètres.

Sonny poussa la porte du Chaudron Baveur tout en coinçant ses lunettes sur le col de son t-shirt puis chercha des yeux ses camarades qui étaient sensés l’attendre dans le pub. Ils étaient déjà là. Un signe vers le propriétaire, qui hocha la tête, et il s’approcha d’eux. Ils se retournèrent ensemble et joyeux, l’accueillirent. Un sourire sincèrement heureux sur ses lèvres, il s’installa entre eux et ils se mirent à parler de banalités. Les verres de bièraubeurre arrivèrent, ils portèrent un toast à la vie, burent, ruminèrent un peu sur ces maudits mudblood et leurs sympathisants qui faisaient une erreur cruciale puis l’un des camarades sortit des cartes. Une Bataille Explosive, un de leur passe temps préféré. Sonny décida de distribuer les cartes. Tous les yeux étaient rivés sur lui alors qu’il les mélangeait, concentrés pour être sûr qu’il ne trichait en aucune manière.

Pourquoi t’as du sang sur la manche ?

Le mouvement fluide et rapide de ses mains s’interrompit brutalement. Son regard suivit celui des autres qui fixaient une tache pourpre sur la manche de sa veste. Un air faussement étonné, comme si on venait de découvrir la tache. Il venait de découvrir la tache avec les autres. Une solution, vite.

Oh… C’est parce que mon frère s’est blessé. J’étais à côté et…

Stupide mensonge, ça va jamais passer.

Ah ouais… Et là ?

Peu convaincu mais on ne contredit pas un Crabbe.

C’était rien de très grave, mais vaut mieux éviter de lui en parler.
Ouais ouais. Bref, t’en étais où là ?

Sonny reprit son mouvement machinal comme s’il ne s’était jamais arrêté. La prochaine fois, il enlèverait sa veste.

Merci
ça ira, j'ai fini :D

YAY !
Merci beaucoup ! :D
Tout naturellement Bonnie

Billie J'attendrais alors (a)
Anton Merci