Bonjour, je me présente. Je m'appelle Hope. Pas banal comme prénom, hein ? Ça en dit long sur ce que mes parents attendaient de moi, vous ne trouvez pas ? J'ai une petite soeur. Elle s'appelle Eleonor. Comme on est les aînées de la famille, notre père a toujours attendu beaucoup de nous. On devait avoir de bonnes notes à l'école, bien se comporter, être souriantes, aimables, on devait s'occuper de nos frères... Il a toujours consacré beaucoup de temps à nous inculquer de bonnes manières. Et je lui en suis totalement reconnaissante. C'est grâce à lui qu'aujourd'hui, j'ai cette façon de penser, cette manière de croire que les sang-mêlés et les moldus ne sont pas des moins que rien, cette envie de faire avancer les choses, cette haine contre tous les sang purs imbus d'eux-mêmes.
Quand on était gamines, ma soeur et moi, on était comme les deux doigts de la main. Toujours fourrées ensemble, à faire les mêmes bêtises, se couvrir, rigoler, partager nos secrets, nos peurs, nos envies. Elle était ma soeur, mais aussi ma meilleure amie, ma confidente, mon pilier, mon double. Tout le monde était époustouflé par notre beauté, et la joie de vivre que l'on dégageait. Et c'est vrai, qu'on était mignonnes. La fierté de nos parents, les enfants parfaites dont tout le monde rêverait. Notre famille, malgré notre sang-mêlé, était destinée à avoir un avenir heureux. Mais visiblement on en a décidé ainsi. Reparler de cette période de notre vie me fait plus souffrir que tout le monde ne le pense. Lorsque nous étions âgées de 8 ans, ma soeur s'est fait enlever. Envolée, disparue, partie. Je n'ai rien vu venir. Je n'ai même pas été capable de la défendre. Je n'étais qu'une gosse, c'est sûr, mais quelque part je m'en suis toujours voulu, au fond de moi. Pourquoi elle ? Ça aurait très bien pu être moi. Pourquoi est-ce qu'ils l'ont prise elle ? Je me suis toujours posée la question, et je crois que je n'obtiendrais jamais de réponse, parce qu'il n'en existe pas réellement.
Depuis ce jour tragique, notre vie a changé. Nous n'avons plus jamais été les mêmes. Une part de moi a été enterrée ce jour là. J'étais si jeune à l'époque... De ne plus avoir ma soeur, du jour au lendemain, ça m'a drôlement perturbée. Mais ça, personne n'a jamais pu le comprendre. Pour tous, je ne suis que "la soeur d'Eleonor". Ils disent que ce n'est pas moi qui ait été enlevée, alors, ce n'est pas à moi d'être métamorphosée. Oui, c'est elle qui s'est fait kidnapper. Oui, c'est elle que l'on a torturé. Oui, c'est elle qui en ressort changée à jamais, avec des liaisons nerveuses en moins. Oui, c'est elle la dérangée mentale, maintenant. Mais pendant tout le temps où elle n'a pas été là, personne ne s'est occupé de moi. Personne ne s'est soucié de ce que je pouvais ressentir. Au fond, je ne leur en veux pas. Mais qu'ils ne s'étonnent pas de me voir changer d'attitude.
Ma soeur a fini par revenir. Je pensais que tout redeviendrait comme avant. Que cet épisode de notre vie ne serait plus qu'un mauvais souvenir. Mais j'étais bien naïve, à l'époque. Comment ai-je pu croire, qu'après tout ce qu'il s'était passé, notre vie reprendrait son cours, comme si de rien n'était. Eleonor est bel et bien rentrée. Mais elle avait terriblement changé. Je l'ai vu dès le premier regard. Je n'y trouvais plus cette petite étincelle de malice. Elle avait disparue. A la place, j'y décelai la peur, la solitude, et une pointe de haine. J'ai d'abord cru que tout cela lui passerait. Mais non. Avec le temps, c'est même devenu pire...
A partir du moment où Eleonor est rentrée, elle est devenue le centre d'attention de tout le monde. Et quand je dis "tout le monde", c'est VRAIMENT tout le monde. Notre famille, nos amis, les voisins, les profs... même les inconnus qui avaient entendu parler de l'affaire n'avaient d'yeux que pour elle. Je n'étais pas contre le fait qu'on lui accorde de l'attention. Mais moi, dans tout ça ? Oui, je suis jalouse, et alors ? C'est normal de réclamer un peu d'attention. Plus le temps passait, moins ma soeur redevenait comme avant, plus les gens s'occupaient d'elle, et plus je la détestais. Alors que j'aurais du la soutenir, l'aider dans sa reconstruction, la faire rire, la consoler lorsqu'elle faisait des cauchemars, j'ai décidé de la laisser seule, et de choisir le camp adverse. Quelque part, je me sens responsable de ce qu'elle est devenue maintenant : cette espèce de folle pro sang-pur qui se tape des crises de démence. Mais maintenant, le mal est fait, on ne pourra rien changer. En plus, ce n'est pas comme si ma haine n'était pas réciproque. Chaque coup bas possible, chaque petite crasse, chaque petite insulte, réflexion désobligeante... on n'y loupe pas.
C'est quand ma soeur est venue à Poudlard que j'ai commencé à changer d'attitude. De la fille simple, souriante, et amicale, je suis devenue la pin-up ultra maquillée, un peu allumeuse, et peste sur les bords. Moqueuse, méprisante, prétentieuse, superficielle, voilà l'image que je dégage de moi. Ceux qui me croisent dans les couloirs vous diront que je ne suis qu'une salope qui veut se faire baiser, ceux qui me connaissent vraiment savent qui je suis, et que cette image péjorative que je me donne n'est en fait qu'une coquille que je me suis forgée pour m'écarter de la réalité.