ignorance. état d'une personne qui n'est pas informée de quelque chose, qui n'en a pas connaissance. c'est tellement plus facile. ne pas se sentir oppressée par la souffrance continuelle et qui reste à jamais. pourquoi? alors la question se pose, presque sans y penser, et même parfois sans réellement avoir envie de connaitre une quelconque réponse. parce que les mots font mal, les explications n'ont ni queue, ni tête. et au final on finit par se rendre compte qu'on a fait une belle erreur en voulant être informé, en désirant briser ce pacte d'innocence en cherchant une solution à nos interrogations. courrez donc mon cher, une ombre ne s'évite pas, de la lune au clair, ABRACADABRA. et puis on a tous en tête ces regrets. n'avoir jamais réellement su quelque chose, n'avoir jamais pleinement saisi l'ampleur qu'elles auraient pu avoir pour vous, si vous aviez fait tel ou tel choix. c'est merdique. parce que je n'ai ni père ni mère et que je n'arrive à blâmer personne d'autre que moi-même. à deux ans à peine, peut-être que monsieur et madame tout-le-monde qui m'avaient vu naitre avaient senti que j'allais être une pure déception. sérieusement, je n'ai pas la moindre idée de ce qui m'a valu la faveur de me retrouver dans un orphelinat désigné par mes soin en tant que "anti-bonheur" . des murs gris, un lit inconfortable, voilà ce qui m'avait attendu là-bas. comme si le sort commençait déjà à s'acharner sur moi, comme si le futur certain qui me courrais après ne suffisait pas à cette chose informe qu'on nomme le destin. merdique, vous dis-je. et puis tout était devenu un peu plus rose, parce qu'au fond, rester dans mon coin n'aurait rien arrangé à la situation, et n'était en aucuns cas amusant. terrifier les autres avec des pseudos-pouvoirs l'était bien plus. vous savez bien de quoi je parle. avec les quelques gamins de mon âge à l'orphelinat, je n'étais jamais parvenue à nous trouver des atomes crochus. parce que j'étais différente, et j'en avais parfaitement conscience. alors pourquoi ne pas jouer, justement, de cette différence? après tout, j'avais finis par me dire que je n'avais plus rien à perdre, autant amplifier cette haine maladive que tout ces gamins (oui, gamins, même s'ils avaient mon âge) nourrissaient envers moi.
j'avais dû faire quelque chose qui les avait effrayé. du genre, faire exploser un vase que j'avais fixé longuement, durant une période de colère particulièrement expressive. oui, quelque chose comme ça. et depuis, il me suffisait d'ouvrir grand les yeux en regardant l'un de ces abrutis pour qu'ils aient peur d'exploser comme ce vase à l'ancienne, et pour qu'il se mette à hurler en courant pour échapper à la sorcière que j'étais.
j'avais fini par apprendre à voir le bon (enfin, se référer à ma propre définition du mot bon) dans chaque situation. personne ne pouvait me voir en peinture, là où je vivais? tant mieux, faisons leur vivre un enfer, au sens propre du terme. dommage, que, depuis que j'avais fait exploser ce vase, plus rien d'anormal ne se soit produit. comme si ça ne se commandait pas. mais bref, l'histoire avait été apportée aux oreilles de tout le monde. j'étais l'orpheline -ennemie- publique numéro 1. et tant mieux. je n'y comprenais vraiment rien. la solitude m'était tellement montée à la tête, que j'avais appris à haïr d'une haine bien trop puissante chaque personne présente ici. j'avais envie de leur faire du mal. du genre les crucifier uns par uns, et les autopsier avant qu'ils soient morts, sans anesthésie. j'avais dû lire ça quelque part. c'était malsain. mais j'aimais bien cette idée. ça me calmait, en quelques sortes, de penser que je pourrais un jour leur faire payer des choses qu'ils n'auront jamais vraiment commises.