Onze ans qu’elle vivait dans le mensonge, onze années où on lui avait tout simplement caché la vérité sur ses origines. Et aujourd’hui, elle se retrouvait devant… absolument rien. Du moins, c’est ce que la petite de dix ans pensait, quelques minutes à peine après que sa mère l’eut mit à la porte. Quel genre de mère était-ce, me direz-vous? La pire qui soit, vous répondra-t-elle avec beaucoup de recul, même si cela lui fait mal de l’admettre. Marchant sous la pluie battante, la jeune Everleigh atteignit enfin une cabine téléphonique non loin de chez elle et, de ses doigts tremblants, téléphona à la seule personne apte à pouvoir l’aider dans ces conditions, la seule personne qu’il lui restait. Une sonnerie, deux sonnerie et enfin, une voix : la sienne.
« Papa, c’est Evey. Tu peux venir me chercher, s’il te plait. » Au bout du fil, elle l’entendit hésiter, puis il le demanda ce qu’il se passait.
« Maman m’a mise à la porte… je… je suis une sorcière, moi aussi. J'ai reçu la lettre de Poudlard. » Aussitôt, il lui assura qu’il allait venir, mais qu’ils allaient devoir parler tous les deux, car il y avait bien plus que de la sorcellerie dans la famille.
Quelques minutes plus tard, s’était dans la voiture de son père qu’il prenait la direction de la maison, son nouveau foyer. Plus jamais elle ne reverrait son quartier de jeunesse, plus jamais elle n’allait pouvoir parler à ses amis d’enfance : tout ça faisait maintenant partie du passé. Sa mère, en la forçant à partir de la maison, lui avait enlevé tous ses repères, elle était complètement perdue. Alors imaginez sa surprise lorsqu’elle tomba face à face avec une réplique d’elle-même sur le porche de la maison de son père. L’horreur, l’incertitude, le doute… puis finalement, un immense soulagement d’avoir retrouvé une part d’elle-même, chose qu'elle enfouie au plus profond de ses pensées. Elle se souvenait avoir questionner sa mère sur ses photos de bébés où deux poupons apparaissaient, et toujours on lui avait servit la même réponse : morte quelque heure après la naissance. Un mensonge, bien entendu, comme tout le reste...
« J’ai toujours su que je n’étais pas seule. » dit-elle seulement avant de tomber dans les bras de sa jumelle Rosann.
« Evey, tu m'as tellement manqué. » Depuis toujours, Rosa connaissait son existence, mais n'avait jamais eu la chance de la rencontrer, cette soeur inconnue. Aujourd'hui, c'était enfin chose faite : les jumelles étaient de nouveaux réunis. Everleigh avait enfin le sentiment d'être à sa place.
« Arrête, grand-mère, je n’en peu plus… » À bout de souffle, Evey s’effondra sur le sol et aussitôt Rosa s’élança vers elle afin de voir ce qui n’allait pas avec sa jumelle.
« Ça va, Rosa, t’inquiète. » La dite jeune fille leva les yeux vers leur ainée, la sermonnant du regard.
« Mamie, fait attention avec Evey. Elle fait des efforts, mais ne la pousse pas à bout. » La vieille femme leva les yeux au ciel, exaspérée par le comportement surprotecteur qu’avait Rosa pour sa sœur jumelle.
« Je ne tolèrerais pas qu’une de mes petites-filles soient misérable en magie : tous les sorciers Pilch de ce monde en sont de grands, et ce sera aussi votre cas. Début jeune fille ! » Ce n’était en rien méchant, cette femme agri essayait seulement de rattraper tous le retard causé par madame Jenkins à cause de son égoïsme à garder l’un des deux poupons. Après avoir découvert que du sang magique coulait dans leur veine, elle avait certes demandé le divorce et séparé la famille en deux, mais elle avait privé la jeune Evey d’un enseignement important : la magie. Résignée, la jeune fille se releva et fit signe à sa grand-mère qu’elle était prête pour la prochaine leçon. Déterminée à réussir, elle ne voulait pas décevoir les seuls membres de sa famille qui croyait encore en elle… Elle aurait tout fait pour leur plaire.
« Je suis prête. » Et l’entrainement magique continua, sous le regard de Rosann qui veillait de près sur sa précieuse jumelle.
La porte claque derrière elle lorsqu’elle alla trouver refuge dans l’une des toilettes abandonnées de la salle de bain fétiche de Mimi Geignarde : le seul endroit où elle pouvait laisser libre cours à ses sentiments, ses peines et ses colères. Evey s’était cachée dans l’une des cabines et elle s’était assise sur le siège de toilettes, la tête entre ses mains. Elle ne comprenait pas que cela lui arrivait, encore. Toujours la même histoire décidément : était-elle seulement faite pour l’amour? Nul ne le savait.
« Evey, tu es là? » La douce voix de sa sœur se fit entendre dans la pièce, et un lourd sanglot s’éleva de sa gorge en seul guise de réponses. Aussitôt, elle entendit des bruits de pas se rapprocher de là où elle se trouvait, et deux bras vinrent enserrer ses frêles épaules qui tremblotaient au rythme de ses larmes.
« Il… il t’a fait du mal? » demanda Rosa, incertaine.
« Non… oui… je ne sais plus. » Les mots s’entrechoquaient dans la gorge d’Evey et aussitôt, elle se remit à pleurer de plus belle. Sa sœur la sera plus fortement contre elle, et elles passèrent plusieurs minutes en silence, blottit l’une contre l’autre, sans rien dire. Evey se savait fragile, mais lorsqu’une peine l’assaillait, elle préférait que tout sorte en une seule fois et ça, Rosa le savait. Cela l’aidait à passer plus facilement au travers des épreuves qui se posaient sur son chemin.
« Il… il avait fait un pari avec des amis. Le salaud. Mais tu sais ce qui est le pire? Lorsqu’il m’a dit que ça n’en valait pas le coup, car j’étais une 'bonne amie". Rien de plus. Je n'étais rien de plus qu'un jeu auquel il n'a même pas voulu prendre part. Pourquoi, Rosa... pourquoi je suis toujours l'amie et pas l'amoureuse? Il y a quelque chose qui cloche chez moi? » Elle s’était confiée à sa jumelle, après un moment, cherchant à comprendre pourquoi sa vie amoureuse se résumait à des garçons la préférant en tant qu’amie plutôt qu’en petite copine. Elle était jolie, plutôt gentille et amusante… un peu studieuse sur les bords mais quand même, le côté intello c’était craquant, non?
« Il ne te mérite pas, Evey. Tu n’as tout simplement pas trouvé le bon. » Allait-il seulement arriver un jour? Elle n’osa pas le lui demander, c’était une question piège de toute façon. Si seulement elle était capable d’ouvrir les yeux sur ceux de son entourage, particulièrement un d’eux qui n’avait d’yeux que pour elle…