Figurez-vous une jeune fille au teint naturellement pâle et aux cheveux blondis par le soleil, vêtue de bottes en caoutchouc rose et d'une salopette bien trop grande pour sa silhouette encore immature, caressant délicatement son poney. C'était Gemma : une banale gamine de la campagne anglaise. Rien de transcendent en soit alors, n'allez pas imaginer que le piment de l'histoire arrivera bientôt : aucun rebondissement, rien qu'une enfance bucolique et paisible auprès des vaches. D'ailleurs au village on se fichait pas mal des scandales, chacun s'attelait à la récolte de ses épis de maïs, point final. C'était une vie simple qui plaisait aux Jenkins, si bien qu'ils avaient choisi de donner son prénom à Gemma puisque "ça ressemble au verbe germer, comme le blé !" choix plutôt atypique dont ils se félicitaient encore. En somme, les Jenkins était une famille modèle et rien ne pouvait ébranler leur foi en l'amour et la paix : il en résultait que Gemma était la candeur même, et tout ce qu'elle demandait c'était de devenir vétérinaire lorsque les autres gamines de son âge aspiraient encore à devenir des princesses. Hormis des parents exemplaires et un poney, Gemma avait aussi un grand frère de 5 ans son aîné, il s’appelait Timothée et il était brillant ; d'ailleurs très tôt il était parti de la maison familiale pour étudier "des trucs pas communs", Gemma l'avait toujours admiré.

- Blondie, j'ai à te parler sérieusement. La voix de Timothée résonna dans le jardin. "Blondie". Gemma était habituée à ce genre de surnoms dont on l'affublait mais elle ne supportait pas qu'un autre que son frère lui en donne, c'était inexplicable même pour elle. «Qu'est-ce qu'il y a, Timothée ?!» s'écria Gemma en ne pouvant réprimer son inquiétude. Sans répondre, son ainé lui fit signe de s'asseoir et elle s’exécuta mollement ; Blondie était apeurée et l'air sérieux de son frère ne la réconfortait clairement pas. Elle tripotait nerveusement ses mains dans l'attente d'une réponse. Que se passait-il ? Timothée, lui, semblait chercher ses mots, paupières à demi-closes et sourcils froncés. Il prit finalement une profonde inspiration et commença: «C'est lorsque j'avais ton âge, que je suis parti étudier loin d'ici, tu te souviens ?», Gemma répondit d'un hochement de tête affirmatif; elle s'en souvenait nettement puisque c'avait été un moment des plus marquants pour elle, une vraie déchirure. Seconde inspiration. Il continua : «Mais, tu sais dans quelle genre d'école je suis ?» Gemma baissa la tête piteusement, elle avait honte d'ignorer ce à quoi son frère occupait ses journées, mais à la maison on n'en parlait jamais. Elle balbutia « Je... Non, on ne m'a jamais expliqué... Mais tu lis souvent, alors j'ai pensé que peut-être tu étudiais pour devenir écrivain ?» Timothée,amusé par la réponse de sa soeur, ne put dissimuler son sourire «Tu n'y es pas du tout, Gemmy !» Piqué au vif, l'enfant répondit du tac au tac « Bah dis moi alors, au lieu de te moquer !» Timothée reprit son sérieux, son air embarrassé bien malgré lui et répondit précipitamment «En fait, je suis un sorcier, j'étudie la magie.» Il souffla de soulagement. Gemma arqua un sourcil, d'abord étonnée elle jaugea son frère puis elle se mit à rire et hilare, elle répondit « Tim', t'abuses ! Je m'attendais à une réelle révélation, dire que j'étais morte de trouille !» Timothée, toujours avec son sérieux légendaire répliqua «Mais, je suis sérieux.» Gemma se stoppa net, il allait trop loin. « T'es toujours le premier à dire que je suis mature et là, t'essayes de me faire croire à un truc pareil ? Ca va, j'ai peut-être onze ans mais, c'est pas pour autant que je suis débile. Si j'ai arrêté de croire au père noël il y a trois ans, c'est pas pour croire aux sorciers.»Le garçon soupira «Quelle tête de mule tu fais.» Avec sa fierté habituelle, Gemma riposta «On a qu'à demander à papa et maman alors ! - Non, eux, ils sont moldus ! C'est pas des sorciers.» Gemma se leva et sembla réfléchir, elle haussa les épaules et lâcha d'une voix fluette «Très bien, on va dire que je te crois. Ça veut dire que je suis une sorcière moi aussi ? Timothée hocha la tête, Gemma renchérit « Ça veut dire qu'on va être dans la même école, qu'on ne sera plus séparés ?!» Le garçon hocha encore. «OH MON TIMO !» Gemma s'écrasa dans ses bras, et le serra contre elle, pleine d'amour.

Cher journal,
Sache que la vie ici n'est pas toujours facile, surtout lorsque l'on s'appelle Gemma Jenkins et, que notre sang est catalogué "d'impur". Pourtant, j'ai d'excellentes notes, souvent supérieures à celles des sangs purs mais, ce n'est pas assez pour eux. Quand j'étais petite, on m'avait pourtant appris à ne pas juger les gens sans les connaitre mais apparemment, chacun n'a pas été éduqué de cette façon. Je suis déçue. La dernière fois, j'ai aidé une première année parce qu'on la traitait de "sang-de-bourbe" et apparemment je suis dans le collimateur maintenant, mais peu importe, ils ne me font pas peur et, je ne m’abaisserai jamais à leur niveau de puérilité. Ma vie est un enfer constant mais, je leur ferai payer. Ah... Si seulement Timo' était encore dans cette école... Mais, je ne préfère pas lui en parler, il risquerait de s'inquiéter et de prendre ma défense ; ce qui équivaudrait à un tas de problèmes. Oh oui, mon frère ne réfléchit jamais avant d'agir ! Bref, mon cours de botanique m'attend.
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Cher journal,
J'ai été changé de maison, je suis maintenant chez les grindeltruc. C'est lamentable et là ,tu as affaire à une Gemma bien énervée et terriblement frustrée. Comment ont-ils osé ? Nous sommes privés de 90% de notre liberté, je ne pourrai même pas voir Paul jouer son match demain ou encore étudier certains bouquins qui me passionnent. Je déteste cette école et ses règles despotiques. Je n'ai plus le courage d'écrire. A la prochaine.

« Elle est bizarre, du genre douce et tyrannique à la fois. Quand on marche droit et qu'on fait ce qu'elle veut, elle est aimante et attachante et tout un tas d'autres trucs gentils mais, quand on a le malheur de la contrarier, de la vexer, de la contredire, ou de parler de son grand frère, elle devient un calvaire et elle, qui est d'habitude si bavarde, se met à nous répondre avec des phrases monosyllabiques. Elle n'aime pas la bagarre, la violence physique mais par contre, elle peut très bien vous sortir vingt-cinq vannes à la seconde. Elle est trop bizarre je vous dis ! D'ailleurs, c'est pour ça que je lui parle plus moi. Bon, en toute objectivité, vous devriez faire de même.»

« Ouais, c'est l'une des personnes les plus rusées qu'il m'est été donné de voir, a première vue elle a l'air inoffensive mais finalement...! Elle arrive à se faire comprendre rapidement et, quand elle a une dent contre quelqu'un, elle le fait bien sentir du coup, elle le met mal à l'aise. Par contre, elle est très concentrée dans ses cours et, investie dans tout ce qu'elle fait. Le fait qu'elle soit une née moldu ne l'empêche en rien de s'affirmer et de défendre la cause des gens comme elle. »